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Photo du rédacteurChloé Dépré

Débâcle embâcle

Dernière mise à jour : 25 mai 2019


Lumières matinales depuis la fenêtre

La météo ici est assez capricieuse et il n’est pas rare d’avoir du vent moyen à plus de 100km/h. D’ailleurs, rien de bien impressionnant ici, on s’y fait vite après avoir eu des tempêtes de plusieurs jours. Le 16 est un de ses jours tempétueux, du vent assez fort et de la neige. Une journée de blizzard comme on en a vue pas mal ici. Rien de bien impressionnant, c’est l’occasion de se rattraper au bureau sur la saisie des données, la rédaction des rapports, réaliser les comptages sur ordinateur,…  Les chutes de neige sont rarement suffisamment fortes pour qu’il n’y ait aucune visibilité permanente. En partant de BioMar pour aller manger au séjour j’aperçois la mer en bas de l’île dans une trouée. Il y a des vagues énormes pour ici, elles déferlent sur les bords de glace et recouvrant même les îles les plus basses. La houle doit être à 2m, on peut voir des rouleaux à certains endroits. Les vagues recouvrent même la piste du lion pourtant 2m au-dessus du niveau de la mer. On en parle rapidement autour de la table, mais à aucun moment on ne se rend compte de ce qui se passe en bas. Après le repas et les activités au séjour c’est le moment d’aller se coucher, bercé par le doux bruit des vagues. Peu de gens ont dû connaitre ça en Terre Adélie. Au petit matin c’est la surprise, cette houle impressionnante à cassé toute la banquise pluriannuelle autour de l’île. Nous sommes isolés de toutes les îles alentours. Cette glace était en place depuis au moins 10 ans, elle était devenu très épaisse et donc difficile à casser. Cette débâcle complète on en parlé en début de campagne. Ça faisait déjà 10 ans que l’Astrolabe n’était pas arrivé à quai dès la première rotation. Tout l’été la mer a rogné ces étendues gelées mais en fin de campagne on pensait vraiment que ce qui restait ne partirait pas et que la nouvelle banquise se reformerait autour. C’est une chance de voir ces îles libérées des glaces. Mais d’un autre côté ce n’est pas pratique pour la suite des études scientifiques. Les empereurs arrivent de l’autre côté et nous ne pouvons que rester spectateur devant ce moment magique. L’eau libre nous sépare, on troc la pulka et le sac à dos contre un petit point de vue en hauteur et une paire de jumelles pour faire les observations de loin. L’hiver approche mais les températures qui permettraient de constituer une banquise solide ne sont pas au rendez-vous. L’eau de mer ne gèle qu’en surface et le moindre coup de vent fait tout partir (il fait entre 2° et -6°C). Début avril nos météos nous annonce des baisses des températures. Suffisamment pour que la glace prenne en épaisseur et soit suffisamment résistante. Après quelques temps nous pouvons retraverser et mettre en route les suivis sur la colonie d’empereurs. On va enfin pouvoir compter la colonie et voir combien d’individus sont arrivés. C’est aussi l’occasion pour moi de baguer les poussins pétrels géants avant qu’ils ne partent (habituellement ils partent entre le 8 et le 11 avril). Le dimanche 14 avril alors que nous n’avons accédé aux îles que quelques jours une tempête est de retour avec des rafales qui atteignent les 105.8 nœud (plus de 190km/h). Ce vent est tellement fort qu’il brise une bonne partie de la banquise formée la semaine passée. Elle faisait plus d’une dizaine de centimètres voir une vingtaine par endroit. Il ne nous reste plus qu’à attendre que le vent et les températures retombent pour reformer une étendue blanche à perte de vue. Impossible de prévoir le temps que cela prendra, quelques jours, plusieurs semaines, il nous faudra être patient. En attendant on reprend les jumelles pour observer de loin et on patiente. Ici c’est la nature qui décide et ça on le sait très vite en venant en Terre Adélie.

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